14 juillet 2015
Étape 3
Au départ de la chapelle Sainte-Anne le GR34 offre une alternative à la route qui conduit à Cherrueix. La vue sur la baie est magnifique. Je distingue au loin des pêcheurs à pied, des barges ostréicoles et des bouchots, comme autant de lignes noires tracées sur la mer. Elle est d'abord jaunâtre, chargée de sable puis bleue aussi loin que porte le regard. Plus proches du sentier les moutons prés-salés paissent tranquillement. En certains endroits la couleur de leur laine se confond avec celle de l'herbage, seules leur tête et leurs pattes noires trahissent leur présence. Ce spectacle ne s'offre pas aux automobilistes et autres camping-caristes, ils sont trop loin et roulent trop vite. Le meilleur moyen de découvrir une région, un pays, le monde, est de les parcourir à pied ou à vélo. On peut prendre le temps de voir, sentir et ressentir, vivre de longues pauses méditatives et l'opportunité unique de s'unir à soi, à l'autre et à la nature qui nous unit tous. Le Mont est désormais dans mon dos et devant moi apparaissent Cancale et la pointe de la Chaîne. Le sable sur le chemin est presque gris, on croirait du ciment. Sur mon passage mes pneus soulèvent un nuage de fine poussière que le vent saupoudre sur les herbes hautes. Je traverse Le Vivier-sur-Mer, Hirel et à Saint-Benoît-des-Ondes je guette la route à gauche qui doit m'emmener à Saint-Méloir-des-Ondes. Je crois la manquer à deux reprises et me résigne, après deux demi-tours, à m'arrêter pour consulter la carte. Je voyage avec le topo-guide vélo du Tour de Manche. Il est lourd et encombrant et ne rentre pas dans les poches de mon maillot. Du coup je le range dans une sacoche et rechigne à m'arrêter pour le consulter quand j'hésite sur la direction à suivre, préférant me fier à mon sens très approximatif de l'orientation. Je me dis que l'aventure est au détour des détours et demi-tours, ce qui m'évite de pester contre moi-même. J'ai donc quitté la côte et continué sur une petite route à travers la campagne. Dans les hameaux les chats m'attendent sur les rebords des fenêtres, les chiens aboient et des visages ridés collés aux carreaux guettent l'arrivée du visiteur. Je traverse Saint-Coulomb et quelques kilomètres plus loin je retrouve la mer à hauteur de Rothéneuf. Je reconnais la route "Saint-Malo par la côte" et me prépare à gravir les nombreuses montées sur cette route qui suit un relief escarpé. Le contraste avec la baie du Mont-Saint-Michel, quittée quelques dizaines de kilomètres plus tôt est saisissant. Mais après quelques minutes seulement je dépasse le panneau Saint-Malo et entre dans la ville par Paramé. Les montagnes russes étaient dans mon dos et l'arrivée est toute proche. Après quelques kilomètres à travers la ville le GPS me dépose au camping la Cité d'Alet dans le quartier de Saint Servan. Je plante la tente, prends une douche bienfaitrice et redescends dans le centre à la recherche d'une laverie et d'un supermarché. Mais le patron du Ptit Encas en face du lavomatic me rappelle que c'est le 14 juillet et que tout est fermé. En guise de ravitaillement je déguste un excellent kebab en regardant mon linge tourner de l'autre côté de la rue. Le camping est calme, la soirée encore chaude, rendez-vous demain.